C’était le second événement le plus attendu de la journée à Perpignan, après la tombée de la pluie, qui arrose enfin les Pyrénées-Orientales ces derniers jours après deux ans de sécheresse. C’est donc sous de fines gouttes que la foule s’est pressée, mercredi 1er mai, vers le Palais des congrès de la ville, pour assister au grand meeting de la campagne des élections européennes du Rassemblement national.

« Jordan fait même tomber la pluie ! », s’amuse un militant du parti d’extrême droite, venu de Toulouse pour assister aux discours du maire de Perpignan, Louis Aliot, de Marine Le Pen et de Jordan Bardella. Comme lui, près de 3 000 personnes, dont des dizaines n’ont pas pu entrer dans la salle, étaient rassemblées pour soutenir leur candidat, grand favori du scrutin le 9 juin prochain. La tête de liste du Rassemblement national en a profité pour dévoiler les noms des 34 premiers candidats qui l’y accompagnent.

Une « sanction électorale cinglante »

Malgré son avance dans les sondages, où il est confortablement installé au-dessus des 30 %, plus de 10 points devant la candidate macroniste Valérie Hayer, Jordan Bardella a tenu à mobiliser ses troupes. « Rien n’est gagné, rien n’est acquis », a-t-il répété, mettant en garde ses partisans contre deux « ennemis redoutables » : l’abstention et la dispersion. « Ne vous dispersez pas sur des listes patriotes qui ne peuvent pas gagner. Ne vous abstenez par, car l’abstention, c’est voter Emmanuel Macron. »

Le président du RN veut faire du bulletin de vote de son parti le véritable « vote utile » à droite. Il estime désormais en privé que les listes Les Républicains et Reconquête ! pourraient ne pas passer les 5 % permettant d’envoyer des députés à Strasbourg. S’adressant aux électeurs d’Éric Zemmour, il les a incités à « voter pour ceux qui peuvent gagner, ceux qui peuvent agir ». « Je vous tends la main », a-t-il scandé.

Avant lui, Marine Le Pen avait fait son entrée dans la campagne en lançant un appel à la « mobilisation générale », souhaitant infliger à Emmanuel Macron « la plus cinglante sanction électorale possible », déclenchant les huées du public au nom du président de la République. « Un seul jour, un seul tour, un seul vote, Bardella ! », a-t-elle ensuite lancé, cette fois sous les ovations de la foule.

« Marine Le Pen a entamé une ouverture du parti, poursuivie par Jordan Bardella. Tous les électeurs sont les bienvenus », s’est réjouie Martine Demonchy, conseillère régionale du RN en Île-de-France, venue pour l’occasion. « Ça ne sert à rien de voter pour un parti qui va faire moins de 5 % », ajoute-t-elle, visant directement la liste de Marion Maréchal.

Anne-Élisabeth, une octogénaire venue avec une amie, explique avoir « voté à droite pendant des dizaines d’années ». Depuis 2012, elle vote RN. « Au début, c’était faute de mieux… Aujourd’hui, c’est par conviction. »« Tous les autres partis m’ont dégoûté », abonde Patrick, agriculteur de 52 ans. « Aujourd’hui, le RN n’est plus un parti d’extrême droite, je le vois comme la droite des années 1970-1980. On n’est plus un parti raciste et de nombreuses personnes nous rejoignent. » Benjamin, 20 ans, milite à la Cocarde étudiante à Toulouse. Lui aussi considère que « le RN, c’est la vraie droite aujourd’hui, c’est le vrai vote français et patriote ».

« L’Europe des nations » contre « l’Europe de Macron »

Passé les considérations politiciennes, Marine Le Pen et Jordan Bardella ont déroulé leur argumentaire opposant leur « Europe des nations » à « l’Europe de Macron ». « C’est leur bilan contre notre projet », a défié la tête de liste. Du côté présidentiel, ils ont fustigé « l’écologie punitive », « l’immigration imposée » ou la « bureaucratie » d’une Union européenne qui vise à « faire disparaître notre nation ». Eux promeuvent une Europe « des identités » et « du patriotisme économique, de la priorité nationale, de la préférence européenne ».

Marine Le Pen a vanté sa vision d’« une Europe sociale », qui mettra fin à « l’explosion des prix de l’énergie » et qui ne fera pas « payer aux plus pauvres la transition écologique ». Jordan Bardella a, lui, déclenché l’hystérie de la salle en dénonçant la « submersion migratoire » et « l’islamisme qui menace », promettant le refoulement des embarcations de migrants et l’expulsion systématique des islamistes étrangers. « On est chez nous ! », lui répond la foule.

Jordan Bardella a conclu son discours en appelant sur scène les 34 candidats qui l’accompagnent sur la liste. Si le RN obtient plus de 30 % le 9 juin prochain, tous ou presque sont en position d’être élus au Parlement européen. Pas de surprise parmi les sortants : l’ex-ministre LR Thierry Mariani, député européen critiqué pour ses positions prorusses, figure bien en 9e position. Les principales recrues, déjà dévoilées au cours de la campagne, comme l’ancien directeur de l’agence européenne Frontex Fabrice Leggeri, numéro trois, l’essayiste Malika Sorel, numéro deux, ou encore le très médiatique commissaire de police Matthieu Valet, numéro sept, ont reçu un accueil particulièrement chaleureux.