En 2017, Molly, une Anglaise de 14 ans, mettait fin à ses jours après avoir visionné sur les réseaux sociaux des vidéos invitant à l’automutilation et la perte de poids. Ses parents obtinrent lors du procès en 2022 l’engagement des opérateurs à mieux tenir compte de la vulnérabilité des adolescents. Las, ces efforts sont restés modestes, et les réseaux sociaux continuent à rivaliser d’imagination pour accroître la dépendance de leurs jeunes utilisateurs.

Pourtant, l’effet fortement nocif d’un abus de réseaux sociaux chez les plus jeunes est désormais bien documenté. De ce point de vue, le rapport rendu mardi par la commission d’experts chargée d’évaluer l’impact de l’exposition des jeunes aux écrans est une bonne chose. N’hésitant pas à dénoncer de manière forte les dangers d’une utilisation trop fréquente et longue aux écrans, il permet de réveiller les consciences aussi bien des parents que des écoles. Dommage, pourtant, qu’il privilégie les annonces spectaculaires, en multipliant les demandes d’interdiction : pas d’écran jusqu’à 3 ans, pas de smartphone jusqu’à 11 ans, etc.

Certes, il faut aider les éducateurs à poser des barrières strictes. Mais ces mesures sont difficiles à mettre en œuvre concrètement, sans placer un policier dans chaque maison… Surtout, faut-il renoncer à promouvoir une véritable éducation à la liberté, en apprenant aux jeunes un usage plus sobre du Web par lequel ils accèdent à une partie de leur culture ? Enfin, il ne faut guère s’étonner de voir les jeunes reproduire les comportements largement en cours dans le monde adulte. Ainsi les parents peuvent-ils critiquer l’effet des écrans sur leurs enfants quand ils inondent leurs propres réseaux de photos de ces mêmes enfants, dotés d’une identité numérique avant même de savoir parler ? Là comme ailleurs, l’éducation est aussi affaire de cohérence.